Plusieurs ouvrages-programmes de clubs de réflexion sur la justice ont été publiés peu avant l’échéance présidentielle, avec pour ambition d’intéresser une classe politique peu à l’aise avec cette institution, et proposer des réformes, essentiellement au principal candidat de la gauche (1). Le livre de Roger Errera est à la fois proche et différent. Proche parce qu’il s’interroge, lui aussi, tant sur la place institutionnelle de la justice en France, dans un rapport complexe à l’État, que sur son rôle dans des domaines aussi importants que la protection des libertés, la lutte contre la délinquance, la justice quotidienne, avant de proposer plusieurs réformes significatives. Mais il est différent de ces autres livres du fait qu’il s’inscrit dans le parcours d’un homme issu des élites à la française, conseiller d’État, spécialiste respecté des libertés publiques, qui avait pesé très tôt dans le débat avec un livre courageux qui avait marqué une génération de juristes : Les Libertés à l’abandon (Seuil, 1975).
Roger Errera appartient à cette minorité de membres d’un corps parfois qualifié d’aristocratie administrative, qui n’a jamais hésité à s’engager publiquement dans la défense des libertés tout en contribuant patiemment dans ses fonctions à la construction de l’État de droit. Membre de commissions de réforme sous Robert Badinter, du Conseil supérieur de la magistrature, du conseil d’administration de l’École nationale de la magistrature, auteur de multiples conférences et articles en France et à l’étranger, il a plus particulièrement nourri pendant plus de trente années les débats et les r...
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