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Jannis Kounellis

 À la galerie Lelong, une nouvelle fois, Kounellis. Mais, ici confronté à Yves Klein, une rencontre qui n’a pas eu réellement lieu. À Art Paris, une longue paroi métallique à laquelle des articulations mesurées insufflaient autant la vie que les matières organiques – charbon, café – souvent utilisées dans ses compositions par le « peintre ».

EXPOSITION
KLEIN-KOUNELLIS
FEU/CONTRE-FEU
Galerie Lelong, 13, rue de Téhéran, 75008 Paris
19 mai – 9 juillet 2011


PUBLICATION
MARC SCHEPS
JANNIS KOUNELLIS
XXII Stations on an Odyssey 1969-2010
Éd. Prestel, 378 ill. coul., 368 p., 125 €

 À la galerie Lelong, une nouvelle fois, Kounellis. Mais, ici confronté à Yves Klein, une rencontre qui n’a pas eu réellement lieu. À Art Paris, une longue paroi métallique à laquelle des articulations mesurées insufflaient autant la vie que les matières organiques – charbon, café – souvent utilisées dans ses compositions par le « peintre ».

Peintre, Jannis Kounellis, artiste né grec, vivant à Rome, présent dans les plus grands musées du monde. Peintre, c’est ainsi qu’il se désigne. Un peintre qui exposa dans une « galerie » de Rome douze chevaux vivants, et dans un musée barcelonais d’énormes quartiers de viande que la pourriture accrue par la chaleur obligeait à renouveler constamment, ailleurs, devenu fameux, un perroquet vivant…

Kounellis écrit. Il analyse ce qui l’en est de l’art aujourd’hui. Il repense l’Histoire de l’art, peut y ajouter un nom, par exemple celui de Rimbaud, grand « peintre », qui a écrit « l’océan noir ».

À l’occasion d’une vaste rétrospective de l’œuvre de Tàpies, organisée au Jeu de Paume par Daniel Abadie, j’avais eu la responsabilité d’organiser un colloque : François Cheng, Arnulf Rainer, Jorge Semprun, René Thom furent parmi les intervenants.

J’avais mis face à face Tàpies et Kounellis. Je n’oubliais pas ce que le Grec avait écrit des célèbres « murs » du Catalan : il opposait le naturel des murs bâtis au naturalisme des murs représentés par Tàpies. Au-delà de ce différend qui engageait pourtant sur deux voies distinctes de la pratique de l’art, beaucoup de points de rencontre qui conduisaient à la même question : Comment inventer la forme qui aujourd’hui nous soit nécessaire ?

L’Histoire y a sa part, sans que – Kounellis y insiste – l’on parle d’une œuvre qui serait issue de l’Histoire. Y a sa part, aussi, majeure, l’acte de l’artiste. Kounellis parle du « rituel de vie ». Sinon des réponses affirmatives, du moins la prise en compte de la crise de la culture. Dans les écrits de Kounellis, semblent percer la nostalgie d’une organisation autour d’un point central. Un entretien entre Kounellis, Beuys, Kiefer et Cucchi a pour titre Bâtissons une cathédrale (édition de l’Arche, 1988).

La diversité de l’œuvre de Kounellis, cathédrale de pièces hétérogènes, montre l’impossibilité de bâtir aujourd’hui une cathédrale.

La composition présentée à la galerie Lelong peut passer pour la mise en scène de cette impossibilité. Face à face aux deux bouts de la salle, des panneaux brûlés. Ici Kounellis, là Klein. Un dialogue « moderne » à partir d’un mouvement originaire, la morsure nourricière du feu.

Entre ces deux propositions « modernes et primitives », rangés au sol, des vêtements tels que l’Histoire de l’art les a déjà rangés dans ses casiers.

Georges Raillard