Il y a une architecture propre à Juan Gris. Elle est apparente en 1919 dans Pierrot à la grappe (Centre Georges-Pompidou) ou, pour s’en tenir au même musée, dans Tapis bleu (1925). Ces œuvres sont reproduites dans l’ouvrage de Daniel-Henry Kahnweiler, Juan Gris : Sa vie, son œuvre, ses écrits. C’est la seule monographie écrite par le célèbre marchand de Picasso.
Juan Gris notait : « Cézanne d’une bouteille fait un cylindre, moi je pars d’un cylindre pour créer un individu, de type spécial […] Cézanne va vers l’architecture, moi j’en pars ».
À cette vue de Juan Gris, un des artisans du retournement opéré par le cubisme, ne répondent guère, apparemment, les images de notre comédie humaine que, parfois, à ses débuts, sous la seule signature de Gonzáles, le jeune artiste illustrait.
Ces illustrations de presse, on les trouve en grand nombre à l’exposition de l’Institut espagnol, et souvent sous leurs deux formes – le dessin original et sa version imprimée. Humour, cruauté, réalisme, des galeries de portraits et de situations. C’est la première fois qu’une telle exposition est réalisée en France. Grâce à une collection particulière. Le catalogue est parfait : L’Indiscret, Le Cri de Paris, Le Charivari. Par le trait, la couleur ou le noir, sont mises en valeur les bedaines des puissants et les silhouettes de sylphide offertes à la « pénétration pacifique » (titre d’une planche) d’un président...
Dans le catalogue, Juan Manuel Bonet, directeur de l’Instituto Cervantes, en historien, considère, « un siècle après » Juan Gris dessinateur de presse. Serge Fauchereau, en conclusion d’un texte fouillé, écrit : « Avoir été voués au coup d’œil éphémère qu’on porte trop souvent aux images des périodiques avait peut-être empêché de reconnaître toutes les qualités plastiques de ces dessins, et combien ils font corps avec toute la production artistique de Juan Gris. »
Georges Raillard
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